Quand on parle de sport automobile, on pense immédiatement à la compétition et à la performance. Si l’objectif est la performance pure, il semble alors naturel de se tourner vers une voiture récente. Pourtant, bien que les sensations soient toujours au rendez-vous, les technologies modernes et l’optimisation de la sécurité ont rendu la conduite des voitures contemporaines plus aseptisée, moins brutale et immersive que celle des voitures de compétition anciennes.
Piloter une voiture ancienne, c’est ne faire qu’un avec la machine. C’est ressentir la moindre vibration, sentir le châssis travailler sous les contraintes, écouter le moteur chanter sans filtre… Mais au-delà de ces plaisirs (qui, pour certains, peuvent sembler être des contraintes), une voiture ancienne ne pardonne rien. L’erreur qui aurait été corrigée par une voiture moderne ne le sera pas ici. Pas d’aides électroniques, pas de filet de sécurité : chaque action du pilote a une conséquence directe et immédiate.
Le pilotage d’une voiture récente est extraordinaire. Le pilote joue constamment avec les limites de l’auto, les vitesses de passage en courbe sont impressionnantes, et la gestion des rapports via les palettes au volant est instantanée et précis, permettant des relances fulgurantes. L’électronique embarquée optimise chaque accélération et chaque freinage, rendant la voiture à la fois plus rapide et plus exigeante à exploiter pleinement.
Maintenant, imaginez ajouter une troisième pédale : l’embrayage. Remplacez les palettes par un levier de vitesse et une boîte non synchronisée. Supprimez toutes les aides électroniques. Enfin, oubliez la sécurité passive ultra-moderne et même le confort superflu : adieu la radio, adieu l’insonorisation. Vous vous retrouvez seul, dans une caisse vide et souvent assis à côté du réservoir, avec un volant, quatre roues et un moteur. Et c’est à vous de jouer. Ici, seule votre technique de pilotage compte.
Les voitures anciennes ont enseigné aux modernes l’art de rouler et de performer sur tous les plans. Sans cette époque qui nous passionne tant et nous est si chère, l’automobile d’aujourd’hui ne serait pas ce qu’elle est. Dans les années 1980, des courses comme les 24 Heures du Mans faisaient office de véritables laboratoires à ciel ouvert. On peut citer, par exemple, l’exploit de Thierry Perrier en 1980, qui mena à la victoire de sa catégorie la Porsche « Rubson » roulant à l’éthanol, devançant des Porsche à moteur thermique. Aujourd’hui, l’éthanol est devenu un carburant courant. Les voitures anciennes ont une aura que les modernes ne peuvent pas reproduire. Il y a cette sensation unique, presque primitive, de devoir écouter un monstre mécanique, de devoir lutter contre son propre instinct de survie qui murmure de lever le pied.
Voir ces machines en action sur circuit, ou mieux encore, les piloter, c’est aussi faire revivre une époque révolue. C’est préserver un patrimoine mécanique qui a façonné l’automobile d’aujourd’hui. Derrière chaque voiture de course ancienne, il y a des histoires d’hommes et de femmes qui ont repoussé les limites, pris des risques insensés pour leur passion, donné leur vie dans une époque où la sécurité n’était qu’un détail. À une époque où le sport automobile comptait chaque année son lot de drames, chaque tour de piste relevait de l’exploit.
Les sensations au volant d’une ancienne sont incomparables. Elles ne se contentent pas d’être fortes : elles sont viscérales. Ce sont des expériences que l’on ne vit nulle part ailleurs.
Calvin Fatin.

